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Traitement de l’information judiciaire sur l'audiovisuel : Le dilemme de la présomption d’innocence et de la liberté d’expression

 Comment garantir l’équilibre entre deux droits constitutionnels : d’un côté, le droit à la liberté d’expression et à l’accès à l’information et d’un autre, le droit à la présomption d’innocence ? C’est l’interrogation à laquelle ont tenté de répondre les participants à la journée d’étude organisée le 26 septembre 2017, par la Haute autorité de la communication audiovisuelle (HACA), sur le thème ‘le Respect du principe de la présomption d'innocence et des procédures judiciaires dans les services de l'audiovisuel’.

Les participants à la séance d’ouverture ont intenté un véritable procès d’intention à une certaine presse audiovisuelle accusée de faire fi de la déontologie et de l’éthique professionnelle. Le constat est accablant : la publication d’images, de photos et de vidéos de personnes poursuivies en justice, qui demeurent innocents jusqu’à preuve du contraire, est une violation grave de la présomption d’innocence et une atteinte à la dignité humaine.

Amina Lamrini El Ouahabi, présidente de la HACA, Mohammed Essabbar, Secrétaire général du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH), Mustapha Ramid, ministre d’Etat aux droits de l’Homme, Mohamed Aujjar ministre de la Justice, et Mohamed Laarej, ministre de la Communication de la culture ont été unanimes pour décrier et condamner ces pratiques qui peuvent avoir des conséquences catastrophiques sur la vie sociale, professionnelle et politique des individus.

Dans ce cadre, M. Essabbar a indiqué que le principe de la présomption d’innocence, le socle de tout procès équitable, ne concerne pas uniquement la justice et le tribunal, mais la société, avec toutes ses composantes, y compris la presse. Pourtant, a-t-il dit, certains médias, dans leur course derrière les scoops médiatiques et leur quête du sensationnel, violent la confidentialité des enquêtes et publient des noms, des faits, des procès-verbaux, voire des photos des accusées ou de leurs victimes potentielles, ce qui constitue une violation du principe de la présomption d’innocence et une atteinte grave à la réputation des victimes, autant que des accusés. Des pratiques qui ne peuvent, en aucun cas, ajoute M. Essabbar, être justifiées par le droit des médias à informer et encore moins, celui du public à être informé.   

Cette rencontre a constitué une occasion pour réfléchir sur une nouvelle approche de traitement de l’information judiciaire en prenant en considération le droit à l’information et le respect de la vie privé des individus. Certes, comme l’a souligné Mohamed Aujjar, à l’instar de Mohamed Laaraj, si l’adoption d’une approche juridique basée sur un rafraîchissement de certaines lois (code pénal, loi sur l’audiovisuelle…) est nécessaire, voire indispensable, cette approche ne peut donner ses fruits sans un véritable renforcement des mécanismes de contrôle par les opérateurs des services de communication et les organes chargés du contrôle. A ce sujet, Mme Lamrini a indiqué que suite à la révision de la loi 77.33 sur la communication audiovisuelle, la HACA se penche actuellement sur la révision des cahiers de charge de ces opérateurs en vue de renforcer les garanties visant le respect de la déontologie en général et le droit à la présomption d’innocence, en particulier.  

Enfin, et en interaction avec la proposition de M. Ramid appelant au renforcement des capacités des professionnels de la presse en matière de traitement des affaires judiciaires, Mohammed Essabbar a affirmé que l’Institut national de formation aux droits de l’Homme-Driss Benzekri est disposé à dispenser la formation nécessaire dans ce domaine aux professionnels des médias concernés par cette thématique.